La liberté de la presse est menacée en République de Guinée, par l’entremise des actes administratifs de la Haute Autorité de la Communication (HAC), instance de régulation du secteur de l’information et de la communication du pays, les incursions constantes des magistrats, des services de sécurité sous l’instigation du parquet général de la Cour d’Appel de Conakry dans l’espace médiatique du pays, pourtant encadré par les Lois organiques sur la liberté de la presse à travers la Loi organique L002/22/06/2010 et sur la Haute Autorité de la Communication (HAC), par le biais de la Loi organique L003/22/06/2010.
Ces actes posés par ceux-là qui sont en charge de ce secteur ne militent pas en faveur d’un meilleur ancrage du cadre juridique et institutionnel des Lois sur la liberté de la presse, car ces décisions portent les germes de profondes discordes sur leur fondement juridique.
Par exemple, la suspension est souvent perçue par la HAC comme une sanction contre les supposées infractions faites à la Loi sur la liberté de la presse, alors qu’elle n’est qu’une simple mesure conservatoire et surtout provisoire, le temps pour les responsables de l’institution de mener les enquêtes en vue de réunir les éléments constitutifs de délits de presse. Au moment où le législateur est muet sur le délai légal de la durée de la suspension, il appartient aux associations professionnelles des medias privés de fixer un délai de trois (3) jours au maximum, le temps pour les autorités de prendre une sanction (avertissement, blâme, mise en demeure) et suspension à un temps réel défini qui ne peut excéder les 72 heures ; au-delà, les medias et journalistes suspendus, reprennent leurs activités.
L’idée de textes d’application émerge ainsi pour mieux étoffer ce cadre juridique pour une meilleure structuration et professionnalisation du secteur de l’information et de la communication.
Ceci reste un chantier ouvert, à explorer, pour déceler les obstacles à l’atteinte d’un tel objectif par les actions de lobbying et de plaidoyer.
Actuellement, l’instance de régulation du secteur de l’information et de la communication de la République de Guinée, abuse de l’article 4 en son alinéa 2 qui dispose : « Elle veille au respect de l’éthique et de la déontologie en matière d’information… ». Alors qu’elle passe outre alinéa 1 dudit article qui dispose: « La Haute Autorité de la Communication assure la liberté et la protection de la presse ainsi que tous les moyens de communication de masse dans le respect de la Loi »
En outre, elle passe outre l’article 4, alinéa 2 qui dispose : « Elle veille à l’accès équitable des Partis politiques, des Associations et des citoyens aux moyens officiels d’information et de communication ».
Malheureusement, malgré cet éventail de prérogatives dévolues à la HAC, elle est plutôt active sur le front de l’éthique et de la déontologie en reléguant aux calendes grecques un pan entier de ses compétences.
Cette anomalie engendre toutes formes d’abus notamment les coups et blessures volontaires sur les journalistes et la destruction délibérée de leurs matériels de travail par les services de défense et de sécurité, la violation de la procédure en la matière par le biais de certains hommes en uniforme sous la houlette de certains magistrats debout.
Cette anomalie débouche souvent sur une interprétation erronée des articles contenus notamment l’article 22, qui a trait aux citoyens de se conformer à la Constitution, aux Lois et aux règlements. De même l’article 28 de ladite Constitution, titre 3 sous-titres 1, qui ne concerne que le Président de la République.
A cet effet, l’évocation des articles suscités de la Constitution par certains juristes en quête de notoriété, frise de la myopie intellectuelle, car tout ce qui n’est pas interdit par la Loi, est permis, c’est un principe universel en droit.
L’autre menace, qui plane sur la Liberté de la presse, est la faible appropriation de ce cadre juridique et institutionnel sur la Liberté de la presse par les journalistes. Cette méconnaissance de ces Lois sur la liberté de la presse les expose constamment à toutes formes d’infractions aux dispositions des articles 98 à 104 de la Loi organique L/2010/02/CNT du 22 juin 2010 portant sur la liberté de la presse.
Par la méconnaissance de ces Lois sur la liberté de la presse par les journalistes, les expose également aux dispositions des articles 100, 101, 103, 104,105 et 106 de la présente Loi. C’est seulement dans ces conditions qu’un journaliste inculpé pourrait être préventivement arrêté.
L’autre signe de ce constat amer est l’infiltration de la profession par les jeunes fraichement sortis des écoles de journalisme, sans base réelle, munis de diplômes déconnectés des besoins d’un secteur en pleine mutation, d’où la baisse des standards professionnels et de la qualité des médias, se caractérisant par la principale dérive suivante :
Le reniement comme ligne de conduite.
Cette situation s’empire aujourd’hui par le manque d’anticipation du ministre de la communication et de la Haute Autorité de la Communication (HAC), plutôt dans la victimisation, l’accablement de l’autre, que d’être en amont dans la prévention et la gestion d’éventuels dérapages au sein des medias guinéens.
Le manque d’obligations de résultats des uns et l’obsession de gains faciles des autres ternissent l’image de notre pays par un recul des libertés individuelles et collectives dans le pays alors que la République de Guinée est en avance sur bon nombres de pays à cause de la dépénalisation partielle des délits de presse et de la Loi d’accès à l’information publique pour la promotion du contrôle citoyen sur l’action publique qui peine néanmoins à être publié au Journal Officiel de la République.
Malgré tout, la flamme née du dégel dans les relations entre la Présidence de la République et les médias privés, à l’aune de l’arrivée du ministre d’Etat Tibou KAMARA dans le cercle des proches collaborateurs du Président de la République, devrait être entretenue de plus belle.
Cette crise ne devrait point entamer cette dynamique enclenchée par le ministre Conseiller Personnel du Président de la République avec les medias publics et privés.
Les déclarations des associations professionnelles des medias, suivie de la marche du 7 novembre 2017 et du dépôt de la plainte contre les gendarmes de la brigade de recherche de Matam, pour coups et blessures volontaires et destructions délibérées de matériels de travail des journalistes, sont les droits constitutionnels, contenus dans les articles 7 et 10 de la Constitution Guinéenne.
Elles prouvent à suffisance la vitalité de la démocratie et de l’Etat de droit en République de Guinée, certains parlent d’ores et déjà de malentendus par le fait des opportunistes et pyromanes ne prospérant que dans des crises.
Moussa Iboun CONTE