Les deux porte-paroles, le colonel Camara pour la présidence et Ousmane Gaoual Diallo, très attendus par la presse guinéenne pour revenir sur la première année de gestion des militaires du CNRD, le 6 septembre 2022 à Conakry (Guinée).
Les deux porte-paroles, le colonel Camara pour la présidence et Ousmane Gaoual Diallo, très attendus par la presse guinéenne pour revenir sur la première année de gestion des militaires du CNRD, le 6 septembre 2022 à Conakry (Guinée). © Guillaume Thibault / RFI
Le sommet de la Cédéao qui a eu lieu jeudi soir en marge de l’Assemblée générale de l’ONU a décidé le principe de sanctions progressives sur des individus guinéens et contre la junte. Ces mesures font suite aux désaccords entre Conakry et l’organisation sous-régionale sur la durée de la transition. Comment les autorités de transition accueillent-elles cette annonce ? Le porte-parole du gouvernement de transition guinéen, Ousmane Gaoual Diallo est notre invité.
RFI : La Cédéao a décidé ce jeudi d’établir une liste de personnes à sanctionner en Guinée et d’appliquer ces sanctions de manière graduelle. Comment réagissez-vous à cette annonce ?
Ousmane Gaoual Diallo : Disons, avec beaucoup de sérénité. Je pense que c’est une annonce qui était déjà annoncée par le président bissau-guinéen [Umaro Sissoco Embalo ndlr] qui assure la présidence de la Cédéao en ce moment. Mais elle n’est pas de nature à faciliter une sortie de crise de la Guinée. La Guinée a besoin moins de sanctions que d’accompagnements. Et cet accompagnement doit absolument prendre en compte la compréhension du contexte et des spécificités de la crise guinéenne.
Qu’attendez-vous de la Cédéao ?
Nous attendons de la Cédéao qu’elle n’applique pas un « traitement paracétamol » à l’ensemble des crises qui secouent la sous-région, parce que chaque pays a ses spécificités et ces problèmes. Et en Guinée, la problématique qui est posée tourne autour des élections. Et donc, c’est un problème qui est vieux et depuis 30 ans, il y a quelque chose qui structure cela. C’est l’absence de confiance ou de qualité d’un fichier électoral.
Mais est-ce que des discussions avec la Cédéao sur la revendication des États d’Afrique de l’Ouest, c’est-à-dire une transition raccourcie à 24 mois, peut-être ?
Nous l’avons dit au médiateur de la Cédéao, le président [Thomas] Boni Yayi ainsi qu’au président en exercice quand il est arrivé. La transition guinéenne ne se discutera pas sur des paramètres périodiques simplement. Elle doit se discuter sur le contenu. Que voulons-nous faire entre maintenant et la fin de la transition ? Établir des listes électorales, faire un « toilettage » constitutionnel et institutionnel, puis séquencer les élections. C’est cela que nous voulons et combien de temps cela nous prendra, c’est à cela que nous devons nous atteler dans un exercice de transparence et d’objectivité.
Mais est-ce que la discussion est toujours possible avec la Cédéao sur la durée de la transition ?
Elle est toujours possible. À partir du moment où ils peuvent nous apporter des éléments objectifs sur le contenu, on peut tout discuter. Nous l’avons dit clairement : en combien de temps la Cédéao estime que la Guinée peut se doter d’un fichier électoral ainsi que d’un fichier d’état civil qui garantit sa qualité ? Et il faut l’adhésion de tous, parce qu’il faut le faire de façon à ce que chacun puisse avoir les moyens de contrôler ce fichier et de s’assurer que les parties qui le concerne y sont. Si la Cédéao estime que cela est faisable en trois mois, et bien la transition prendra trois mois. Ce n’est donc pas la durée qui pose problème, c’est ce qu’il faut faire.
Ce qui ne va pas faciliter les relations entre les autorités de transition guinéennes et la Cédéao, ce sont les échanges qui ont lieu, ces derniers jours. Des mots très durs ont été prononcés notamment par le porte-parole et secrétaire général de la présidence. Amara Camara a qualifié de « honte » et de « mensonge » les propos du président de la Cédéao, le président bissau-guinéen. Est-ce que le canal n’est pas rompu après des échanges d’une telle violence ?
C’est clair que lorsque le dialogue n’est pas sincère, lorsque que l’on dit une chose et que l’on fait son contraire, ce n’est pas de nature à garantir la confiance qui est nécessaire avec la Cédéao. Et donc, le président Embalo doit comprendre aussi qu’il est un porte-parole des chefs d’État de la région et que son discours doit être teinté de respect, de retenue et de distance. Et ça, c’est quelque chose que l’on ne retrouve pas concernant ces sorties médiatiques contre la Guinée et c’est quelque chose qui exaspère.
Le contact ne peut pas être rompu parce qu’il n’est pas lié à un individu. La Guinée a une histoire dans la Cédéao. Une organisation dont le président Embalo assure la présidence pour une période assez limitée. Le contact est avec une institution : la Cédéao. La Guinée est représentée à travers ses diplomates. Donc il y a énormément de canaux disponibles et nous sommes disposés à maintenir ces canaux-là et à faire cet exercice de pédagogie nécessaire pour faciliter la collaboration avec cette institution sous-régionale.
RFI