Souleymane Thiâ’nguel : Aujourd’hui, nous avons décidé de travailler avec Mamadi Doumbouya… nous n’avons de compte à rendre à personne,

Souleymane Thiâ’nguel : Aujourd’hui, nous avons décidé de travailler avec Mamadi Doumbouya… nous n’avons de compte à rendre à personne,

NOUS, MOUTONS NOIRS AU MILIEU DES BREBIS… ÉGARÉES ?

Il y a quelques mois, j’entendais un illuminé sorti des entrailles d’une mosquée d’hérétiques me menacer de mort. Ce qui lui servait de bouche disait qu’on me cherchait à Dakar pour me dépiécer le corps. Paraît que le colosse Madou m’avait envoyé pour espionner Cellou Dalein et lui faire du tort…

Récemment, c’est un montage vidéo mal embouché d’un fichu cor, où on avait associé mes dénonciations d’alors, en les comparant aux récents morts…

Il y a deux jours, émergeant de mon tendre canapé où je dors, un confrère m’a envoyé une capture d’écran dans laquelle quelques visages prenaient corps : le mien, ceux de Boubacar Yacine Diallo, Elhadj Thierno Mamadou Bah, Bachir Diallo, Colonel Aminata Diallo et Ousmane Gaoual Diallo. On pouvait lire : « Ces foullah qui se sont mis au Service du clan ethno-régionaliste du CNRD. C’est fils et filles… – excusez la faute. Quand on est mû par la haine et par l’aigreur et qu’on faisait cuicui avec les oiseaux pendant les cours, y a de quoi retourner Molière dans sa tombe… – Donc, la publication disait : C’est fils et filles qui préfèrent service – oups ! Molière a encore séboula, net – ce clan DIABOLIQUE qui diabolise, stigmatise et tue les enfants du Fouta ».

Il est évident que ces phrases sont les fumées épaisses des messes basses dont le wirtèrè de loup garou, remontent des salons où nos amis nous brodent façon poupée vaudou. Mais ils oublient qu’ils étaient avec nous, lorsque le pays brûlait de la dictature féroce qui nous malaxait dans la gadoue. Nous avons partagé les larmes des familles des assassinats fous. Nous avons fui en petit trouillard les injustices de körö et son courroux. À travers les nuits folles et les gardes-frontières frivoles et chelous, nous avons emprunté les chemins incertains d’un exil loin de tout. Nous avons usé corps et caleçons sans le sou, dans les fonds des prisons de dégoût, au même titre que des bandits qui ont volé, arnaqué et assassiné partout.

Il est aussi évident que nous avons à chaque manifestation fait face aux balles allumées. Contrairement à certains gamins révoltés, de familles spoliées et de concessions violées, nous avons eu la chance d’échapper aux feux des kalachs déterminés et des armes de poing qui ont planté leurs piquets au cœur de nos quartiers désolés. Et aujourd’hui, on se fait attaquer par ceux que nous avons contribué à élever. Comble d’ingratitude et d’arrogance démultipliée.

Qu’on se le dise tout net sans sourciller : Dans ce bled flagellé, nous n’avons plus rien n’à prouver. Et ce ne sont certainement pas des politiciens qui ont déchanté, des activistes déboussolés, de gens dont l’engagement forcené se limite à Facebook et ses publications éculées, après avoir avalé deux bouchers d’un lafidi mal préparé, un café mal torché, un yaourt ou une compote d’un rayon soldé, derrière un ordinateur acquis avec prêt, entre des moments d’égarements narcissiques réguliers, qui vont nous faire la leçon d’amour pour notre patrie la Guinée

Personne ici n’a le monopole d’un patriotisme éprouvé. Nous nous sommes engagés en politique sans égoïsme. Si on ne peut pas être reconnaissant aux sacrifices que nous avons acceptés, qu’on nous colle la paix pour qu’on entende les pets des vieilles grands-mères aux fesses ridées.

Nous avons été dans ce pays au cœur de toutes les manifestations répétées, au cœur d’une terre traversée des spasmes du communautarisme. Nous avons abandonné nos boulots et servi avec altruisme. Nous avons parfois perdu des contrats de travail après tellement d’efforts, abandonnés à nos pauvres sorts. On nous dira qu’il y en a qui sont morts. Oui, c’est vrai que certains ont connu plus de torts. Mais ce n’est pas parce que tu tais le terrible deuil qui te dévore, que refuser de ravaler la putride souillure qui m’essore, devrait faire de moi un félon obligé à un quelconque remord. Tais-toi. C’est ton choix. Moi, je ne me tairais pas. C’est aussi mon choix. Autant je respecte les deuils de chacun, autant je refuse d’imposer à mes fêlures un frein. Oui des larmes ont coulé du fait d’assassinats sans fin. Mais les larmes ont aussi eu le visage d’exils fréquents et malsains, de virages malheureux à faire face au quotidien sans tendre la main, de rouages d’embastillements sans soins.

Et c’est ici qu’on s’attaque à Ousmane Gaoual le renégat, qu’on le traite de menteur et de tous les noms d’oiseaux, lui faisant porter toutes sortes d’oripeaux. Alors, à moi aussi de jouer mon salaud, publiquement sans peur d’un enregistrement pour lécher des égos.

Et c’est là que je leur demande : ont-ils su par exemple que mon appel à contribution pour faire face à mes frais d’avocat, avec la toute la puissante machine des militants et de la grande direction nationale du parti, que je n’avais pu mobiliser que quatre milles euros, sur des honoraires de seize mille euros ? Les journalistes à l’époque ont tout fait pour me tirer la langue. Aussi longue que je l’aie toujours eu, j’avais fait le choix de prendre sur moi et refuser de renvoyer la responsabilité engagée de mes amis, puisque c’est du fait de mon appartenance politique qui m’avait dégagé de mon pays. Combien d’appels n’avais-je pas reçu ce jour pour me féliciter. Et la même phrase retentit encore : « C’était très bien. Tu as refusé de tomber dans le piège des journalistes ».

Et c’est là que les talibés plus hyènes que lapins vont me dire que pourtant on a arraché pour moi la lune de son écrin et me démonter les étoiles pour remplir ma gueule ouverte et ma panse béante.

Et Ousmane Gaoual de parler de visite chez lui. Et c’est là que je demande : savent-ils qu’en cinq années d’exil mes amis ne seront venus chez mes parents que deux fois, à l’occasion d’évènements spéciaux, notamment le départ et le retour de mon père de La Mecque et qu’aucun haut responsable du parti n’a jamais su où j’habite avec femme et enfants ? Cinq longues années, des dizaines de passages pour aller dans des mariages ou des baptêmes d’autres personnes, sur l’axe, où vivent mes parents, jamais une petite halte : « Et si on s’arrêtait saluer la famille de Thiâ’nguel et voir comment elle se porte ! » Cinq années. J’attends les preuves du contraire… et les photos du VAR… Je pourrai parler d’autres choses… mais pas pour l’instant… Parce que les peuls disent : « goundo fow yidhaa kènè ». Traduction : « tous les secrets n’aiment pas qu’on les mette à quatre pattes, qu’on expose leur gbingbin à l’air pour faire voir le calcif donkafèlè délavé et puant qu’ils portent ».

Qu’on nous parle pas de fraternité ou de solidarité. Qu’on nous baratine pas de la rengaine de l’amitié et de la loyauté. Qu’on nous bassine pas, s’il vous plaît, de banalités aussi insipides que la pisse d’un âne mal gaulé.

En tout état de cause, nous avions décidé d’adhérer à un parti sans attendre que quelqu’un vienne nous chercher. Nous avions aussi décidé de partir de ce parti sans que quelqu’un vienne nous l’exiger. Aujourd’hui, nous avons décidé de travailler avec Mamadi Doumbouya pour servir la Guinée. Exactement comme lorsque nous avions décidé de rejoindre l’UFDG. Et nous n’avons de compte à rendre à personne, éventuellement qu’à notre conscience qu’ils soupçonnent friponne. Mais celle-ci, cette foutue conscience-là boit tous les jours du yé glacé et sirote du djindjan formé façon igloo du pôle Nord en toute tranquillité. Nous avions fait vœu de silence, par considération pour le combat que nous avons mené, pour le respect des aînés et la dignité qui nous a été inculquée.

Pourquoi devrions-nous avoir honte de travailler avec un homme qui a choisi de nous faire confiance parmi douze millions de Guinéens pour refonder un pays éclopé ? Pourquoi ne serions-nous pas des patriotes parce que nos avons fait serment de loyauté à l’égard d’un homme que nous savons mû uniquement par la défense des intérêts de notre pays ? Pourquoi devrions-nous plus écouter des gens qui nous flinguent en public et nous font la lèche en privé, parce qu’ils veulent que tel ou tel problème d’un des leurs soit réglé, en oubliant que s’ils nous demandent de l’aide et que si nous pourrions régler le problème posé, c’est uniquement par le fait du décret de celui qu’ils combattent ? Pourquoi devrions-nous vomir sur l’avenir de nos enfants et suivre obligatoirement des gens qui se lèvent tous les matins pour aller bosser, ceux dont les enfants ont un présent lumineux et un avenir radieux, ceux dont les activités tournent régulièrement pour engranger des bénéfices, ou ceux qui ont un salaire à la fin du mois, certains dont les enfants, maris ou femmes, frères ou sœurs, cousins ou cousines, neveux ou nièces, tantes ou oncles ont servi un régime aussi violent qu’assassin de près deux cents guinéens et qui pactisent aujourd’hui avec ces meurtriers, ceux qui ont démarché pour obtenir des postes qu’ils n’ont pas eus se révèlant farouches opposants à Mamadi Doumbouya parce qu’ils avaient des CV vides ou bidonnés et n’ont pas su convaincre le panel d’entretiens ? Quand ils auront les réponses à ces questions, on parlera. En attendant, nous avons un pays à servir.

Nous avons fait le choix d’adhérer au projet de refondation de Mamadi Doumbouya et Dieu sait que chaque jour qu’il fait éclore nous servons ce pays honnêtement, patriotiquement, dans la dignité et la responsabilité. Nous continuerons ce service, sans coup férir, sans fléchir, sans bleuir, sans blêmir. Qu’on continue à faire de nous des traitres parmi les moutons à punir. Mais sachez que noir aussi est une couleur qui peut faire frémir. Et en attendant d’autres menaces et autres enregistrements pièges à deux bonbons glacés, qui auront désormais les répliques à la hauteur des manipulations et de leurs commanditaires, je ferme ma gueule et je dégage !

Souleymane Thiâ’nguel Bah