L’ambassadeur de France au Niger Sylvain Itté et six collaborateurs ont quitté Niamey mercredi matin, une exigence des militaires au pouvoir à laquelle Paris a fini par céder après plusieurs semaines de bras de fer.
Son départ a été confirmé par une source au sein du ministère de l’Intérieur nigérien qui a précisé à l’AFP que l’avion était parti en direction du Tchad. Dimanche soir, le président français Emmanuel Macron avait annoncé le retour à Paris de M. Itté « dans les prochaines heures ».
Le lendemain, le régime nigérien arrivé au pouvoir par un putsch le 26 juillet avait dit attendre « que cette déclaration soit suivie d’actes officiels émanant des autorités françaises compétentes ».
Les militaires exigeaient le départ de M. Itté du pays depuis fin août. Ils lui avaient retiré son immunité et son visa diplomatiques, mais Paris refusait jusqu’ici de le rappeler. La France affirme depuis le coup d’Etat qu’elle ne reconnaît pas la légitimité des militaires au pouvoir et que son interlocuteur reste le président renversé Mohamed Bazoum.
Né à Bamako en 1959, Sylvain Itté était en poste depuis un an, quasiment jour pour jour, au Niger. Diplomate depuis 35 ans, il a été nommé ambassadeur en Uruguay en 2013, puis été ambassadeur en Angola de 2016 à 2020.
Départ des soldats
Emmanuel Macron a également annoncé dimanche que les 1.500 soldats français déployés au Niger dans la lutte antijihadiste quitteraient le pays d’ici la fin de l’année, une autre demande du régime de Niamey. Selon M. Macron, la France met ainsi fin « à sa coopération militaire avec les autorités de fait du Niger, car elles ne veulent plus lutter contre le terrorisme ».
Les militaires qui ont célébré ces annonces comme « une nouvelle étape vers la souveraineté du Niger », ont toutefois souhaité que ce retrait se fasse « dans un cadre négocié et d’un commun accord pour une meilleure efficacité ».
Le Niger, comme ses voisins du Burkina Faso et du Mali, est la cible d’attaques jihadistes récurrentes sur son sol depuis plusieurs années. Les relations entre Niamey et Paris, son ancienne puissance coloniale, sont au plus bas depuis le coup d’Etat du 26 juillet.
Des manifestations et des rassemblements pour le retrait des troupes françaises au Niger ont réuni des dizaines de milliers de personnes dans la capitale ces dernières semaines. C’est le troisième pays sahélien qui demande le retrait des troupes françaises en moins de deux ans après le Mali et le Burkina Faso, également dirigés par des militaires arrivés au pouvoir par des putschs.
« La France n’a pas su se retirer au bon moment et a voulu continuer de jouer le leader dans un contexte où l’environnement sociologique a fortement changé », et avec lui la façon dont elle est perçue en tant qu’ex-colonisateur, analyse Fahiraman Rodrigue Koné, chercheur principal à l’Institut des études de sécurité (ISS), spécialiste du Sahel. « La France doit totalement repenser sa présence en Afrique, pas seulement au Sahel. On a des populations très jeunes, décomplexées qui ont accès à toutes les informations de ce qu’il se passe dans le monde, la France n’est plus la référence numéro 1 pour beaucoup », ajoute t-il.
Les Etats-Unis, qui disposent de 1.100 soldats au Niger, ont indiqué de leur côté évaluer leurs options quant à un éventuel retrait. La semaine dernière, l’Allemagne avait prévenu que sa centaine de soldats déployés au Niger pourrait également se retirer si la France choisissait cette option.
Avec AFP